Asclépiade: un important client se retire
AGRICULTURE. La soie d’Amérique a visiblement besoin de plus de temps pour satisfaire aux exigences des entreprises qui souhaitent la commercialiser. La Coopérative Monark, qui regroupe quelque 125 producteurs d’asclépiade au Québec et au Vermont, vient de perdre, pour la deuxième fois en moins d’un an, un acheteur d’envergure.
L’entreprise Monark Eco Fibre Inc, qui avait racheté les actifs de Gestion Protec-Style l’automne dernier, soutient n’avoir reçu que 2 des 100 tonnes de soie d’Amérique promises pour la récolte 2017.
«Si on nous avait annoncé d’emblée qu’il faudrait être patient, que nous n’aurions peut-être pas la quantité voulue la première année, ça aurait été clair et nous aurions pris une décision éclairée, mais ce n’est pas le cas. Des promesses ont été faites», déplore le président Chafic Zakaria, dont l’entreprise œuvre dans la confection de manteaux et de sacs de couchage.
«Si nous n’avions pas cette assurance de résultat, nous n’aurions pas versé 50 000$ à la coopérative», indique M. Zakaria, précisant avoir avancé la moitié du montant prévu pour l’achat de 100 tonnes de soie de la récolte 2017.
L’«échec de la technologie de la récolte mécanique» serait en cause. Le président de Monark Éco Fibre dit avoir demandé un plan d’urgence à la coopérative en février, dans le but d’éviter le pire pour la récolte à venir. La récolte manuelle, envisagée, ne pourrait toutefois garantir que 20 à 25 tonnes de soie à Monark Eco Fibre.
«À ce stade-ci, nous estimons que la filière est très vulnérable et en danger. Sans un approvisionnement garanti et prévisible, elle n’est pas viable», soutient M. Zakaria.
L’entreprise entend désormais se mettre à la recherche de nouveaux partenaires et elle n’exclut pas de contacter directement des membres de la coopérative. Si aucun producteur d’asclépiade ne répond à l’appel de l’entreprise, un plan de fermeture sera envisagé.
Rappelons que l’entreprise de transformation Protec-Style et ses filiales Les Industries Encore3 (Saint-Tite) et Fibre Monark a déclaré faillite en octobre 2017, après avoir déploré «l’échec d’une récolte de qualité en provenance de la Coopérative Monark».
Les producteurs ne sont pas inquiets
La présidente de la Coopérative Monark, Nathalie Léonard, rappelle que la culture de l’asclépiade est encore très récente et qu’effectivement, les techniques de récolte et d’extraction de la fibre sont toujours en développement.
«En agriculture, c’est très difficile de prévoir», se défend-elle. «Nous sommes incapables de prédire exactement quelle quantité nous pourrons fournir. Nous sommes encore en développement», martèle-t-elle.
«Nous avions promis la récolte 2017. Les calculs (des 100 tonnes) avaient été faits par Protec-Style et Les Industries Encore 3», soutient-elle. «Il n’y a pas eu de promesse écrite», ajoute-t-elle, tout en soutenant que la plupart des producteurs n’ont pas le temps de faire une récolte manuelle.
Le retrait de ce potentiel partenaire d’affaires d’envergure n’effraie pas outre mesure les producteurs. Un de perdu, dix de retrouvés? «C’est un acheteur qui vient de tomber, mais un parmi d’autres», soutient la présidente, qui soutient avoir beaucoup de demandes pour son produit issu de l’asclépiade.
«Nous allons peut-être nous concentrer à produire une fibre de moindre qualité, comme nous le faisions au début, qui sert à absorber des produits pétroliers. Si nous atteignons le niveau de qualité nécessaire pour le textile, tant mieux.»
La coopérative travaille à développer les techniques de récolte et d’extraction de la fibre avec l’entreprise Bioptère. «À la base, nous devions être des producteurs seulement», rappelle-t-elle. La faillite de Protec-Style en pleine récolte 2017 a ajouté à la charge de travail des producteurs.
La Coopérative Monark est basée à Saint-Adelphe. La Mauricie regroupe plusieurs producteurs d’asclépiade, notamment dans la MRC de Mékinac.