W-WKLN perd sa cause
Une cause entourant la vente de chandails contrefaits lors de l’édition 2013 du Festival Western de St-Tite a connu son dénouement le 1er novembre dernier à la Cour du Québec de Shawinigan.
Camille Elias était accusé d’avoir enfreint la Loi sur le droit d’auteur en vendant des vêtements arborant la marque W-WKLN. Le 7 septembre 2013 en après-midi, des agents de la GRC se présentent au kiosque de l’accusé sur le site du Festival Western et saisissent plus de 1700 pièces de vêtements, dont 86 chandails à l’effigie de la marque W-WKLN.
Lancée en 2010, la bannière W-WKLN commercialise des vêtements dits streetwear, un amalgame de courants tiré des cultures de la planche à neige, de la planche à roulettes, du hip-hop et du hipster. On retrouve des boutiques W-WKLN à Montréal, Québec, Laval et Ottawa. Le pdg de l’entreprise, Pierre-Olivier Mercier, a même témoigné lors du procès tenu à Shawinigan.
Camille Elias contestait l’accusation sur deux points: que la perquisition de la GRC était illégale et abusive car réalisée sans mandat; et que la preuve ne démontrait pas qu’il savait que les vêtements en vente étaient de la marchandise contrefaite.
Sur le point de l’illégalité de la saisie de la GRC, le juge David Bouchard a donné tort à l’accusé, jugeant qu’une "personne qui accepte de louer une espace temporaire pour vendre au grand public des vêtements préalablement exposés à la vue du public ne peut s’attendre à avoir une expectative raisonnable au respect de sa vie privée dans ce lieu et sur les objets mis en vente."
Même si la poursuite invoquait un aveuglement volontaire de sa part, Camille Elias a cependant obtenu raison quant à sa connaissance du caractère contrefait de sa marchandise. Durant les témoignages, le propriétaire des boutiques WKLN a certifié que les chandails saisis ne provenaient pas de ses fournisseurs à cause de la qualité des tissus et des impressions de qualité inférieure à ses propres produits.
Droit d’auteur enregistré après la saisie
L’accusé n’ayant pas voulu témoigner lors de son procès comme la loi lui permet, c’est sa déclaration prise par écrit lors de la perquisition en septembre 2013 qui a été présentée au juge. Elias avait alors déclaré à un policier avoir acheté les vêtements sur la rue Chabanel à Montréal d’un «gars» non identifié qui lui dit que c’est «OK». Il est de notoriété que cette rue montréalaise est reconnue comme un endroit où il se fabrique des vêtements pour la vente en gros directement au public.
Dans son jugement, le magistrat convenait que la réponse d’Elias n’était pas une confirmation des plus explicites de sa non-connaissance de la provenance de la marchandise mais que la preuve de la poursuite ne permettait pas au Tribunal d’en tirer une conclusion différente. Et comme il s’est prévalu de son droit de ne pas témoigner, il n’a pu être interrogé par la couronne.
Il a été aussi démontré durant le procès que bien qu’elle la commercialisait depuis juin 2010, W-WKLN avait procédé à l’enregistrement de son œuvre seulement en décembre 2013, soit peu après la saisie survenue à Saint-Tite. Pour le juge Bouchard, l’enregistrement d’un droit d’auteur est une information publique qui aurait pu dans cette cause renforcir les prétentions de la couronne face à Camille Elias mais le fait que ce droit n’était pas enregistré en septembre 2013 procure à l’accusé une ignorance qu’on ne peut refuter sans avancer de preuve.
Ce verdict n’est pas sans conséquence pour l’avenir. Avec plus de 600 000 visiteurs durant dix jours, le Festival Western de St-Tite attire des commerçants de partout au Québec en septembre. Ce sont d’ailleurs plus de 800 kiosques qu’on retrouve dans les rues de la petite ville de la Mauricie. Les marchandises les plus diverses y sont offertes, souvent avec les logos des grandes marques mais au caractère authentique douteux.
W-WKLN est l’un des premiers à vouloir poursuivre ces commerçants ambulants qui font la tournée des festivals mais ce jugement pourrait laisser songeur d’autres ayant les mêmes visées.