Les bienfaits et les défis de l’éducation en plein air
L’éducation en plein air comporte de multiples avantages, aussi bien pour les enseignants que pour les jeunes, mais ceux qui souhaitent la mettre en pratique doivent relever de nombreux défis, a-t-on entendu mercredi dans le cadre du 89e congrès de l’Association canadienne-française pour l’avancement des sciences (ACFAS).
Même un court contact avec la nature peut avoir des effets positifs sur les apprentissages, leur rétention et leur transfert, ainsi que sur l’attention, ont démontré de récentes études scientifiques.
D’autres recherches ont associé l’éducation en plein air à une diminution de la sédentarité, à une augmentation de l’activité physique légère, et à une réduction de la pression sanguine et du risque de myopie. On mentionne également une réduction de l’anxiété et une hausse du bien-être général, du sentiment d’efficacité personnelle et de l’estime de soi.
«On ne va pas juste à l’extérieur pour avoir du plaisir puis jouer, a souligné Jean-Philippe Ayotte-Beaudet, le titulaire de la Chaire de recherche sur l’éducation en plein air, à l’Université de Sherbrooke. Il n’y a pas de problème à le faire, mais il y a plusieurs personnes qui peuvent avoir des préjugés comme quoi quand on va dehors, c’est juste pour avoir du plaisir. (…) Les personnes qui pratiquent l’éducation en plein savent qu’il y a des processus en lien avec l’enseignement.»
Malgré tous ces avantages apparents, il est encore difficile de savoir quelle place l’éducation en plein air (à savoir, des situations d’enseignement réalisées en plein air et dont l’objectif principal est de mener à des apprentissages) occupe dans les écoles du Québec.
Des chercheurs de la Chaire ont donc demandé à 1008 enseignants et enseignantes du Québec, aussi bien au primaire qu’au secondaire, de répondre à un court sondage en ligne en décembre 2020 et janvier 2021. Un suivi téléphonique plus étroit a ensuite été effectué auprès de 133 d’entre eux.
La vaste majorité des participants enseignaient au secteur public, principalement dans un milieu semi-urbain.
Surtout au primaire
Première constatation: la pratique est plus répandue au primaire qu’au secondaire. Le tiers des enseignants de niveau primaire ont ainsi confié avoir enseigné en plein air en 2019 et en 2020, mais un autre tiers ont admis ne l’avoir jamais fait. L’autre tiers est représenté par ceux qui avaient enseigné en plein air soit en 2019 (8,7 %), soit en 2020 (19,1 %).
Au secondaire, plus de la moitié des enseignants ont révélé n’avoir jamais mis le nez dehors avec leurs jeunes à des fins éducatives. Un quart des participants avaient enseigné à l’extérieur en 2019 et 2020. Des pourcentages comparables de 7,4 % et 10,7 % l’avaient fait lors d’une des deux années.
C’est donc à dire que, au total, près de 43 % des enseignants qui ont répondu à cette enquête n’avaient jamais pratiqué l’éducation en plein air.
Aux deux niveaux, sans grande surprise, c’est l’éducation physique et à la santé qui arrive au premier rang des matières les plus souvent enseignées à l’extérieur. Le français, les mathématiques et la science et la technologie suivent au primaire. Au secondaire, les positions de 2 à 4 sont occupées par la science et la technologie, les langues et les arts.
Si la cour d’école est bien évidemment le lieu où ces enseignements se produisaient le plus souvent, les participants ont également mentionné un parc municipal, ou encore un boisé ou une forêt. Les chercheurs ont aussi été étonnés de constater que plusieurs enseignants révélaient avoir à leur disposition une «classe extérieure aménagée».
Connecter les jeunes à la nature, utiliser des contextes concrets au service des apprentissages et bénéficier d’un plus grand espace sont les trois raisons les plus souvent mentionnées pour expliquer le recours à l’éducation en plein air.
Entre 93 % et 97 % des enseignants qui pratiquent l’éducation en plein air ont dit percevoir des bienfaits sur le bien-être des élèves, sur leur motivation, sur leur apprentissage et sur la pratique d’activités physiques. Toutefois, seulement 63 % ont constaté une amélioration de l’attention de leurs jeunes.
«On n’est pas juste dans des apprentissages formels de contenu, on peut avoir des valeurs ou des sentiments à développer», a dit M. Ayotte-Beaudet.
Plusieurs enseignants ont aussi témoigné de bienfaits pour leur propre santé mentale.
Les conditions météorologiques et la gestion des élèves comptent parmi les principaux obstacles que rencontrent les enseignants qui partent à la rencontre de la nature avec leur classe.
Un participant à l’enquête a ainsi dit avoir dû réduire son nombre de sorties à l’extérieur par rapport à l’année précédente, en raison de la présence au sein de son groupe de jeunes un peu trop exigeants. Un autre s’est réjoui de pouvoir faire appel à une multitude de parents bénévoles, en soulignant qu’il peut être très précieux de compter sur des yeux supplémentaires.