Un autre béluga meurt à Marineland; la qualité de l’eau jugée «acceptable»

TORONTO — Trois semaines après la mort d’un autre béluga à Marineland, le gouvernement de l’Ontario parle publiquement de son enquête en cours sur le parc, affirmant que les problèmes d’eau sont maîtrisés après un récent investissement.

L’inspectrice en chef du bien-être animal de la province a déclaré à La Presse Canadienne que, selon elle, les décès de mammifères marins dans la destination touristique de Niagara Falls, en Ontario, n’étaient pas liés à la qualité de l’eau.

Et ce, malgré le fait que l’eau ne répondait pas aux normes de soins jusqu’à récemment, a indiqué Melanie Milczynski dans une rare entrevue.

Elle a offert le premier aperçu de l’enquête de quatre ans du gouvernement sur Marineland, le seul endroit au Canada où des baleines sont toujours en captivité.

Cinq bélugas sont décédés dans le parc au cours de la dernière année et 17 sont morts depuis fin 2019, selon les registres gouvernementaux. Trois autres bélugas vendus à un aquarium du Connecticut en 2021 sont morts depuis.

Kiska, la dernière orque du pays en captivité, est décédée en avril 2023. Un dauphin, un phoque commun, un phoque gris, deux otaries et deux manchots de Magellan sont également morts dans le parc au cours des cinq dernières années.

La mort la plus récente de la baleine a suscité de nouveaux appels de la part des politiciens de l’opposition pour que la province explique ce qui se passe, la cheffe néo-démocrate de l’Ontario avançant même que le parc devrait être entièrement fermé.

Marineland n’a pas répondu aux questions sur la mort des animaux, et avait plus tôt accusé le journalisme publié par La Presse Canadienne d’être motivé par les «convictions et l’activisme personnels de son journaliste en matière de droits des animaux».

Le parc a déjà déclaré que la mort des animaux faisait partie du cycle de la vie et a défendu son traitement des animaux. Il a également affirmé que l’eau n’avait rien à voir avec les décès.

«Amélioration importante» de l’eau

L’«équipe proactive» d’inspecteurs de la province, qui est une unité spécialisée de dix inspecteurs qui examinent les zoos et les aquariums, teste l’eau de Marineland chaque semaine, a signalé Mme Milczynski.

Ils ont visité le parc 205 fois depuis que la province a pris en charge l’application du bien-être animal de la Société ontarienne pour la prévention de la cruauté envers les animaux en 2020, a-t-elle déclaré.

Elle a assuré que Marineland teste également régulièrement son eau et que les résultats correspondent à ceux du gouvernement, qui montrent une «amélioration importante» de la qualité.

Mme Milczynski a reconnu qu’à un certain moment, le parc ne répondait pas aux normes de qualité de l’eau. Elle n’a pas précisé quand cela s’est produit.

En 2020, les services de protection des animaux ont lancé une enquête sur le parc. L’année suivante, ils ont déclaré que tous les mammifères marins du parc étaient en détresse en raison de la mauvaise qualité de l’eau et ont ordonné à Marineland de régler le problème. Marineland a fait appel de l’ordonnance tout en niant que ses animaux étaient en détresse, mais a ensuite abandonné cet appel.

Mme Milczynski a dit qu’elle ne savait pas quelle était la raison derrière cette ordonnance à l’époque, mais les décès de mammifères marins ne semblent pas être liés aux problèmes d’eau du parc.

«D’après les informations qui m’ont été données, je ne le crois pas», a indiqué Mme Milczynski, devenue inspectrice en chef du bien-être animal en mars.

Elle a assuré que «les normes sont respectées» en ce qui concerne la qualité de l’eau.

«C’est vraiment un travail à plein temps de surveiller la qualité de l’eau dans un système d’eau potable fourni par la municipalité, dans une piscine ouverte au public et de la même manière dans les installations de Marineland», a-t-elle expliqué.

«Ils ont investi dans une technologie importante qui les aidera à le faire, et nous avons travaillé avec eux et appris d’eux ce que fait cette technologie. Et pour cette raison, c’est dans les limites acceptables, mais comme il s’agit d’un nouveau système, nous voulons avoir la certitude que le système fera ce qu’il est censé faire chaque jour.»

La cause des décès nébuleuse

Le ministère du Solliciteur général, qui supervise l’inspection du bien-être animal, a déclaré que 32 ordonnances ont été émises depuis 2020, et que quatre d’entre elles sont actuellement ouvertes.

Une ordonnance relative à la qualité de l’eau, ou aux «systèmes de survie», comme l’a appelé Mme Milczynski, reste en suspens.

Une deuxième ordonnance en suspens exige la tenue de registres appropriés sur le «traitement» des mammifères marins, sur laquelle le parc travaille, a déclaré Milczynski.

Elle a déclaré que Marineland connaissait la cause de la mort des animaux, mais que la province ne pouvait pas discuter de ses conclusions.

Interrogée sur les détails de la cause des décès les plus récents, Marineland a déclaré qu’elle ne communiquerait plus avec un journaliste de La Presse Canadienne.

«Une divulgation juste de vos convictions personnelles en matière de droits des animaux et de votre activisme est totalement absente de vos reportages», a déclaré le parc dans un courriel.

«Vous avez constamment fait preuve d’une incapacité à « rapporter » de manière professionnelle, en avançant plutôt des déductions et de fausses allégations à l’appui de vos opinions personnelles. Vous avez constamment omis de rapporter des faits connus ou de faire les enquêtes nécessaires si cela ne fait pas avancer votre « position ». Cela peut être efficace pour vos « objectifs », mais cela laisse le public mal informé et non informé. Ce n’est pas du reportage.»

Le parc a ensuite suggéré que les questions de La Presse Canadienne «semblent se limiter à cocher une case pour indiquer que vous avez demandé des renseignements».

En mars, Marineland a répondu aux questions sur la mort de deux bélugas ce mois-là. Le parc a déclaré que les deux étaient morts d’une torsion de l’estomac et qu’il n’était «pas possible d’opérer les bélugas pour corriger ce problème».

«Étant donné que la population de baleines de Marineland est la plus importante au monde, plus importante que toute l’Amérique du Nord, des problèmes de santé typiques de la population se produisent ici», a déclaré Marineland dans une déclaration écrite à l’époque.

«Toutes les baleines sont sous la surveillance et le contrôle hebdomadaires constants du régulateur gouvernemental et soignées quotidiennement par des vétérinaires internes et de nombreux consultants externes. La réalité est que tous les animaux finissent par mourir d’une cause ou d’une autre, que ce soit dans la nature ou en captivité».

L’opposition demande des comptes

La nouvelle du dernier décès de béluga a incité les dirigeants de l’opposition et les militants des droits des animaux à demander à la province de faire plus dans le parc.

«C’est honteux. Ils auraient dû fermer cet endroit il y a des années», a déploré la cheffe du NPD Marit Stiles.

«Je pense que le gouvernement devrait agir et je peux assurer à tout le monde que si – quand – nous formerons le gouvernement, nous le ferons.»

La cheffe du Parti libéral Bonnie Crombie a déclaré que le gouvernement doit être tenu responsable.

«C’est un thème constant avec ce gouvernement provincial: il n’y a aucune responsabilité parce qu’il n’y a aucune transparence dans tout ce qu’il fait», a déclaré Crombie.

«Ayons un peu de transparence. Quel est le plan pour garantir que ces magnifiques mammifères reçoivent les soins appropriés et qu’ils ne meurent pas?»

L’avenir demeure incertain

À l’été 2023, un journaliste et un photographe de La Presse canadienne ont visité Marineland. Le personnel a déclaré qu’il y avait 37 bélugas dans le parc à l’époque. Peu de temps après la visite, Marineland a interdit au journaliste d’accéder à sa propriété.

Après les décès de l’année dernière, on estime qu’il reste 32 bélugas. Des images de drone tournées par le groupe de défense UrgentSeas ont montré 32 bélugas dans le parc à la mi-octobre.

Des images récentes publiées par l’organisation sur les réseaux sociaux montrent l’une des baleines transportée par une grue et rejetant les poissons d’un dresseur.

«Dès qu’il faut intervenir physiquement pour nourrir l’animal, la situation est désastreuse», a déclaré le cofondateur du groupe, Phil Demers, ancien dresseur du parc. Il croit que la baleine est malade.

Marineland a révélé au début de 2023 rechercher un nouveau propriétaire et n’a pas précisé ce qu’il ferait des animaux restants une fois le parc vendu. L’été dernier, le parc n’a été ouvert que deux mois, au lieu des cinq mois habituels, avec peu d’animaux exposés.

La propriétaire Marie Holer est décédée le mois dernier. À l’époque, le parc avait déclaré qu’un plan de succession avait été mis en place, mais n’avait pas fourni de détails.

L’Ontario a l’intention de transformer la région de Niagara en un «Las Vegas du nord». Le ministre provincial du Tourisme a déclaré que le parc ne faisait pas nécessairement partie de sa vision.

« Quoi que fasse le gouvernement là-bas en ce moment, ça ne fonctionne pas», a déclaré M. Demers.

«Attendent-ils simplement que toutes les baleines meurent?»